LA PIETA MeL

INTERVIEW MANUSCRITE #77 – LA PIETÀ @ DIEGO ON THE ROCKS

INTERVIEW DE LA PIETÀ PAR DIEGO*ON*THE*ROCKS

Rencontrer LA PIETÀ entre deux confinements est un moment privilégié. Entrer dans la salle du “Bijou” à Toulouse et avoir droit à une interprétation pour un spectateur unique de “La Bohème” d’AZNAVOUR l’est encore plus… la charmante Virginie a accordé une interview à Musiques En Live afin de parler de son album “La Moyenne” sorti en mars 2020 synonyme de transition entre un passé douloureux et un avenir prometteur. Avec Diego, elle a également évoqué ses influences, sa méthode de travail, l’Italie et l’exercice du piano-voix différent de ses productions habituelles. Voici la retranscription d’un bel entretien, une perle croisée au détour du bijou…

DIEGO ON THE ROCKS : Quelle évolution ressens-tu entre tes trois chapitres sortis en EP précédemment et ce premier album publié en mars ?

LA PIETÀ : C’est particulier car il s’agit de mon premier disque que l’on pourrait assimiler à un best-of ! J’ai sorti un bouquin en 2015 qui s’appelle “La Moyenne, à Peine” dont sont tirés les textes de l’album. Initialement je ne voulais publier que des EP pour relater cette période de ma vie. Il faut considérer ce LP comme une conclusion qui envisage ce que je veux devenir.  LA PIETÀ est une aire de jeux avec des projets très différents, du piano-voix à l’électro. J’ai travaillé sur ce disque avec un ami pianiste pour un résultat moins “home made”. “La Moyenne” comprend de l’électro modulaire avec des sons organiques alors que les premiers EP contenaient des samples et des boucles. 

DIEGO ON THE ROCKS : L’écriture n’est-elle pas plus subtile dans cet album que dans tes EP tout en conservant une ambiance qui n’appartient qu’à toi ?

LA PIETÀ : Eût égard à mon expérience, j’ai beaucoup de mal avec l’idée d’être cataloguée par une maison de disque. Mon nouveau projet intéressait les professionnels mais avec pour objectif de “définir” LA PIETÀ comme une artiste masquée, noire et blanche, sombre, désabusée, provocatrice… cela m’a donné envie de faire autre chose et j’ai publié “La Salle d’Attente” afin de sortir d’une case prédéfinie.

DIEGO ON THE ROCKS : Par malchance et en t’écoutant, on peut penser que tu ne rencontres que des goujats dans ta vie !

LA PIETÀ : Il ne faut pas nécessairement confondre l’auteure et la narratrice. LA PIETÀ est un exutoire dont le projet comprenait un livre et des EP répartis sur 3 ans. Après plein de concerts apportant une énergie positive, je souhaite continuer le concept et je m’ouvrirai sur autre chose une fois la période “La Moyenne” finie. 

DIEGO ON THE ROCKS : Il est rassurant de constater que les chansons les plus réussies à mon goût sont également celles que tu n’as pas mis en vidéos ! Je conclus que l’album mélange du “bon” et du “bon”… un titre comme “Noël Toute Seule” c’est du vécu ?

LA PIETÀ : La plupart des choses naissent de vérités. Mon grand amour d’une époque m’avait dit que je ne passerai plus jamais noël toute seule… après je brode autour. 

DIEGO ON THE ROCKS : Le Mal Du Siècle” reflète le mal-être de notre société devenue exsangue ? 

LA PIETÀ : Oui, inspiré de ressentiments personnels. J’ai vécu avec un mec dépressif et mon père avait la même maladie en plus d’être suicidaire… je connais cette problématique très occidentale. Il y a un décalage entre notre société capitaliste et nos sentiments d’être humain.  

DIEGO ON THE ROCKS : La chanson “Je Revendique” n’est-elle pas inspirée musicalement d’un riff de DEPECHE MODE ?

LA PIETÀ : Je n’ai pas composé ce titre contrairement aux EP précédents. C’est la première fois que j’ai accepté d’autres musiciens dans mon univers, il faudrait poser la question à ANTHONY BELLEVRAT qui aime cette période 80’s ! C’est donc possible qu’il aime DEPECHE MODE

DIEGO ON THE ROCKS : Le titre “La Moyenne” était dans le chapitre 1 et “Ma Guerre Est Finie” clôt ton album. Tu confirmes que la boucle est bouclée ?

LA PIETÀ : C’est un concept-album. Une histoire qui débute au fond du trou pour finir en renaissance. 

DIEGO ON THE ROCKS : Donc “Exister pour jouer est essentiel” ?

LA PIETÀ : Pourquoi pas le contraire ! Pour jouer il faut exister !

DIEGO ON THE ROCKS : Et L’indépendance est-elle la plus grande valeur que doit conserver un artiste ?

LA PIETÀ : Difficile de dire si cela “doit” être comme ça. Mon cheminement fût différent et même si j’aime reposer ma tête sur l’épaule de quelqu’un d’autre, j’aime ma liberté. J’ai travaillé précédemment avec des maisons de disques et l’expérience reste un souvenir douloureux. Manager, tourneur… j’ai du mal à ne pas diriger et suis adepte de l’artiste-entrepreneur. Les plus grands artistes savent ce qu’ils veulent et comment ils vont présenter puis parler de leur musique. STROMAE et ORELSAN sont des personnes qu’actuellement j’estime beaucoup et qui sont dans cette lignée.

DIEGO ON THE ROCKS : Dans le même style, il y a THE INSPECTOR CLUZO ! Des chics types. Comment t’est venu le concept visuel du nouveau clip “Pas Désolé” en ombres Chinoises ?

LA PIETÀ : C’est de l’animation 3D qui est inspirée du théâtre d’ombres. Le réalisateur est AL3PH, je l’ai rencontré suite à une annonce Facebook. Il a effectué un boulot énorme car le dessin nécessite énormément d’application. Je suis très contente du résultat, l’ensemble du projet s’étant étalé sur un an. Sans budget, AL3PH a fait ça en plus de son travail initial.

DIEGO ON THE ROCKS : Concernant ta méthode de travail, le texte habille ta musique où ta musique déshabille ton texte ?

LA PIETÀ : Je n’ai pas de méthode précise. J’écris souvent des textes malgré un manque de temps actuel dû à l’accumulation des taches liées à l’indépendance. Dès que je cogite, les textes viennent de manière musicale, un débit rythmé autour des mots. Parfois le texte sera sans accompagnement de départ, d’autres fois la mélodie arrive avec les paroles. Ensuite je prends ma guitare et j’essaie d’arranger l’idée initiale. Ma dernière composition remonte à une dizaine de jours lors d’un concert à Vannes, sur la route. La phrase “On est pas tous fait pour être heureux” trottait dans ma tête et j’en ai fait une chanson. 

DIEGO ON THE ROCKS : Avant LA PIETÀ, tu jouais dans des projets personnels qui s’appelaient ILIS puis ODyL. T’arrive t’il d’interpréter des anciens morceaux de cette période comme “C’était l’Hiver” ou “Petite” ?

LA PIETÀ : Non. C’était le monde d’avant ! ODyL était mon nom d’artiste et ILIS le groupe dans lequel je jouais. J’ai effectué un virage après ma période “maison de disques” où je refusais de m’orienter vers un côté pop. Cela m’a dégoûté de la musique provoquant mon déménagement dans le sud. Je pourrais rejouer “Petite“, l’idée est bonne.  Il m’est arrivée de re-interpréter une ou deux fois “Salaud” que j’aimais beaucoup. 

DIEGO ON THE ROCKS : J’espère qu’elle n’était pas dédicacée à un spectateur ! (rires). Plus sérieusement, l’exercice piano-voix comme les concerts de cette semaine à Toulouse est-il un challenge difficile ?

LA PIETÀ : Oui et c’est tout nouveau pour moi. Avec ANTHONY BELLEVRAT nous sommes partis de compositions pianos pour créer ce disque. J’ai voulu aller plus loin afin de produire un spectacle à part entière sans me rendre compte de mes expériences passées. Je n’ai jamais fait de concert sans rythmique, batterie ou sample et j’ai du travailler au métronome. L’exercice est différent et je m’en suis encore rendue compte hier lors d’une résidence pour préparer le show de ce soir. 

DIEGO ON THE ROCKS : Autre sujet, tu t’investis pour les autres par l’intermédiaire de CHANSIGNE. Tu peux m’en parler ?

LA PIETÀ : Oui. C’est une manière de mêler la langue des signes et la danse afin de mettre en mouvement des chansons pour les sourds et malentendants. Une traduction de la musique par la chorégraphie qui anime le “mouvement musical”. J’ai découvert ça l’an passé à Montpellier en travaillant avec un interprète de langue des signes qui s’appelle CARLOS CARRERAS. Il est également comédien et spécialiste du chansigne. Nous avons créé un titre avec des sourds malentendants qui s’exprimaient à leur manière et j’en ai fait un texte. Une superbe expérience. Nous devrions renouveler le concept et pourquoi pas, produire un spectacle d’ici 2 ou 3 ans.

DIEGO ON THE ROCKS : Mais NOIR DESIR ou FLORENT PAGNY ont déjà utilisé ce principe pour produire des clips ?

LA PIETÀ : Je l’ai également fait dans le clip de “Je Revendique“. Après, les clips de NOIR DESIR et PAGNY sont de la “langue des signes”, pas des “chants-signes”. Le texte est traduit mais pas chorégraphié. La danse et l’expression des visages ont vraiment de l’importance.

DIEGO ON THE ROCKS : Nuance qui a son importance pour les novices que nous sommes ! Quelles sont les chansons des autres qui te font vibrer depuis toujours ?

LA PIETÀ : Je suis très fan de HOLE, le projet de COURTNEY LOVE. C’est elle qui m’a donné envie de prendre une guitare et la chanson “Violet” est ma préférée. J’ai même le tatouage du titre de l’album sur le bras : “Live Through This“, un album en grande partie composé par COBAIN. J’écoute aussi de la chanson Française : “La Bohème” d’AZNAVOUR, “La Chanson Des Vieux Amants” de BREL. J’aime également DALIDA, NOIR DESIR, le groupe Français CABADZI. Un genre de slam rythmique très bien écrit. 

DIEGO ON THE ROCKS : Pour HOLE  je confirme ! Cela s’entend lorsqu’on écoute “Petite” titre de ODyl dont je parlais lors d’une question précédente. Nous avons un point commun, aimer l’Italie. Quel est l’endroit que tu préfères ?

LA PIETÀ : Rome ! J’ai toujours aimé cette ville. Si le COVID le permet, j’irai l’an prochain durant 4 mois composer le prochain album. Je suis Italienne de coeur sans l’être de sang.

DIEGO ON THE ROCKS : Dernière question, as-tu un message à passer au groupe Facebook qui s’appelle “Les Adorateurs de LA PIETÀ”  ?

LA PIETÀ : Je connais ce groupe et je les remercie ! Il a été créé par PATRICK BULLE que je salue car c’est son anniversaire aujourd’hui (jour de l’interview). Merci à tous ceux qui suivent mon projet et à toi DIEGO pour cette interview.

DIEGO ON THE ROCKS : Merci et à bientôt. 

 

    • Remerciements : Virginie
    • Page facebook : @Lapietamusic
    • Relecture : Jacky G.