RAMONEURS MeL 1

INTERVIEW #192 – RAMONEURS DE MENHIRS @ DIEGO ON THE ROCKS

INTERVIEW RAMONEURS DE MENHIRS PAR DIEGO*ON*THE*ROCKS

Une nouvelle fois pour Musiques En Live, je rencontre Loran guitariste des RAMONEURS DE MENHIRS, un groupe fier de représenter les rebelles Bretons. L’artiste est entouré d’Eric à la bombarde, Richard au biniou et Gwénaël au chant. Remerciements particuliers à Jerome Tillié, président de MONTEZ LE SON située à Barsac (33) qui a autorisé cette interview. Créée en 2016 avec un concert inaugural d’OPIUM DU PEUPLE, cette association parrainée par Didier Wampas qui comprend une vingtaine de bénévoles a produit 28 évènements (et fait jouer 76 groupes). Les mécènes mélomanes sont les bienvenus pour aider les rockers du sud-Gironde.  ramoneurs DIEGO : Merci de me recevoir une nouvelle fois pour Musiques En Live. Qu’ont fait les RAMONEURS DE MENHIRS durant la crise sanitaire ? LORAN : Nous avons constaté que la culture n’était pas essentielle contrairement à l’industrie de consommation dite “classique”. Je pensais que cette crise serait un déclencheur de réflexion pour les Français tant nous avons été privé. En fin de compte, c’est le contraire et j’ai le sentiment que c’est pire qu’avant la Covid ! Concernant les RAMONEURS, nous avons joué dans l’esprit “prohibition”. Nous n’avons jamais arrêté les concerts malgré les interdictions et nous produisions dans des caves, des greniers et des salles à manger. Nous sommes là pour jouer et nous opposons à toute forme d’interdiction surtout lorsque tu peux être entassé dans un supermarché pour consommer. Idem pour les transports en commun. Nous avons “pris le maquis” en nous produisant grâce au “bouche à oreille”. DIEGO : En avez-vous profité pour avancer dans le futur album ? LORAN : Non. Nous avons de nouveaux morceaux en cours de finition mais nous sommes restés sagement à la maison et en famille. Tu sais, ma grande fille Alice a 41 ans et mes derniers enfants 15, 16 et 19 ans. C’est la première fois de ma vie depuis que je fais des concerts que je profite d’eux ! Tout le monde était étonné de cette nouvelle vie, un moyen de renforcer nos racines. J’ai même jardiné et déjeuné en famille tous les week-ends. Je regrette simplement l’absence de culture durant toute cette période. Qui aurait pu envisager une interdiction des concerts en 2020 ? DIEGO : Un point commun aux albums des RAMONEURS est qu’ils contiennent tous une reprise des BÉRUS ? LORAN : Exactement et souvent un lien avec la Bretagne. “Vive Le Feu” par exemple sur le premier album c’est parce qu’Éric qui joue de la bombarde est celui qui sonnait sur le titre original à l’époque de BERURIER NOIR. Le titre “Mineurs En Danger” est un texte posé sur la musique de “La Blanche Hermine” et personne ne s’en est rendu compte à l’époque. J’ai un jeu basique à la guitare et les choeurs sont similaires, un lien de plus entre notre région et les RAMONEURS. Pour “Ibrahim”, j’habitais dans le nord de la Bretagne, le pays de Léon. J’ai entendu l’air un lendemain de cuite joué par un Bagad local ! En fait il s’agit d’un air traditionnel. Nous l’avons adapté sur disque. Enfin pour “Porcherie”, nous voulions marquer notre opposition à l’extrême droite et même dans le gouvernement actuel, des types comme Darmanin ont un comportement hallucinant. Dans les 70’s, nous avions la beat-génération et le mouvement hippie, tous deux anticapitalistes. Suite à cela, le punk est arrivé avec la fin du monde industriel, notamment en Angleterre. Une effervescence musicale. Actuellement, les groupes de rock se professionnalisent mais dès que tu grattes un peu, ça semble vide. “L’esprit punk” est parti et nous régressons. Il faut faire avec car le temps passe… Alice était en photo dans la pochette de l’album “Concerto Pour Détraqués” ! Elle avait 4 ans… maintenant j’en ai 59 ! DIEGO : Et ce prochain disque ? LORAN : Il est presque bouclé et  nous jouons la prochaine reprise de BERURIER NOIR en concert. Par contre pas de nouveautés car les gens filment et il n’y a plus de surprise lorsque l’album sort. C’est dommage car je préfère roder un titre en concert avant de l’enregistrer en studio. DIEGO : Et cela permet de jauger la réaction du public ! LORAN : C’est clair, également de voir si nous sommes à l’aise avec le morceau. La fluidité est importante. J’aime ce qui est simple et efficace. DIEGO : Peux-tu me parler du clip “Lacri-Moged” ? LORAN : Un morceau dans l’urgence. Ce soir de la fête de la musique où un jeune est mort après avoir été gazé par la police. Tombé sur les quais de Loire de 6 mètres de haut… 17 jeunes à l’eau. En pleine nuit le DJ a balancé “Porcherie” après avoir refusé d’arrêter la musique et cela a été un carnage. Le but était de rendre hommage à Steeve. DIEGO : Tu as déjà joué avec le Bagad de Lann-Bihoué qui dépend de la marine Française ? LORAN : Nous n’avons pas joué ensemble mais nous sommes croisés en festival. Ils sont rock n’roll et ceux qui y jouent sont tranquilles, après ce n’est pas dans notre mentalité d’être dirigé par un commandement militaire ! Nous avons performé avec le Bagad de Quimperlé car Eric et Richard ont sonné pour eux à l’époque, d’ailleurs ils ont été champions de Bretagne en 1989. Ils sont dans la meilleure division. DIEGO : Comment se porte la tribu “RAMONEURS / BERURIER” très présente à vos concerts ? Le réseau Facebook est très actif. LORAN : Il y a un esprit. Nous sommes leur représentant. Quitte à parler des BÉRUS, je préfère que les gens aient l’esprit BxN. Nous n’étions pas juste un groupe et sommes toujours des “rebelles”. On retrouve la même mentalité dans ces deux formations et c’est dingue de penser que les BÉRUS se sont séparés en 1989… Nous étions un collectif, une famille. Je revois François de temps à autre qui fait quelques apparitions avec Rebeka, l’ex-chanteuse de SEXY-SUSHI. Elle est également dans le combo MANSFIELD. François continue d’écrire des textes mais ne se sent pas de repartir sur la route pour des concerts. Personnellement je préfère le show aux albums. Sans concert, je ne ferai pas ce job. DIEGO : Comment le décès de la chanteuse Louise Ebrel en 2020 (à 80 ans) t’a t’il affecté ? LORAN : Son départ a marqué toute la Bretagne. Louise était l’une des dernières chanteuses de gavotte et de plinn (danses populaires et traditionnelles) avec l’esprit et la façon d’être. Elle était punk à sa façon et anticonformiste. Autour du cou elle arborait sa vierge de baptême et pulvérisait les générations. Les jeunes étaient époustouflés par sa façon d’être… être punk ne se résume pas à porter un tee-shirt, c’est une attitude. Elle était artiste et militante. Avoir un regard critique c’est bien, agir c’est mieux. La mouvance alternative vient de là, une culture différente. L’époque BERURIER NOIR c’est “l’anti-Barclay”, les nanas de 15 ans en string avec de la coke, la chemise ouverte et les dents refaites. Tout ce que nous haïssons aujourd’hui. Une mafia du show-biz. Avec François nous n’avions pas la prétention de donner des leçons mais simplement d’ouvrir les yeux des gens avec nos guitares et boites à rythme sur des textes simples. Tout le monde aurait pu être les BÉRUS et c’est pour cela que 34 après, on en parle encore. Simple comme une plante qu’on arrose régulièrement. DIEGO : Raison pour laquelle tu as retrouvé ton petit côté horticulteur durant la période Covid ! (rires) LORAN : Exactement ! Mais je l’avais avant ! Dans les années 90 j’ai longtemps vécu à la montagne. Pour revenir à Louise, elle manque énormément car elle était notre maman spirituelle. Une énergie féminine, forte comme un menhir. Elle envoyait grave. Si à 25 ans, on m’avait dit que je chanterai avec une mamie sur du punk… même sur disque je n’y aurais jamais cru. DIEGO : Et vous éditez encore des vinyles ! LORAN : Oui, on sort des 45 tours qui sont vendus à nos concerts. Je pense qu’on en a plus vendu après la mort des BERURIER NOIR que dans les 80’s. A l’époque nous étions un groupe parmi les autres, nous avons eu une belle mort et avons bien fini à l’Olympia en 89, dignement. DIEGO : Bientôt le retour au Québec ? LORAN : Oui prochainement. Nous y allons régulièrement, 7 concerts en 6 jours courant mai. C’est sympa d’y aller excepté les douanes Américaines qui te font remplir des questionnaires sans fin. DIEGO : Tu as des livres de chevet ? LORAN : L’évident “1984” de George Orwell et également “La Ferme des Animaux” du même auteur. Ce dernier est moins connu. J’aime Virginie Despentes qui a su bien écrire sur les BÉRUS. Nous avons fait un bouquin qui s’appelle “Ta Rage N’Est Pas Perdue”, recueil photographique de Roland Cros qui nous a suivi durant les 3 dernières années. C’est Virginie qui commente les images, à l’époque elle jouait avec son groupe de rap STRAIGHT ROYEUR dans les squats. Un super livre qui est épuisé et à force de le filer aux amis, je n’en ai plus d’exemplaire ! Un collector. LORAN DIEGO DIEGO : Quel est le programme des RAMONEURS pour 2023 ? LORAN : On va essayer de sortir notre 5ème album, sans prévision établie car les morceaux sont prêts. Evidemment, nous continuons les concerts, entre 80 et 100 par an. DIEGO : Et vous ne passez pas souvent en Gironde ! Ambiance bobos-écolos tout en ayant eu des maires de droite… LORAN : Oui c’est particulier à Bordeaux… Juppé, Chaban-Delmas, les bourgeois. Dordogne, Landes et pays Basque sont des endroits où nous passons mieux. Une ville comme Nice, on n’y joue jamais ! DIEGO : Merci Loran et à bientôt pour un troisième volet de tes aventures ! LORAN : Pas de problème. A bientôt !
  • Remerciements : Jerome de l’association Montez Le Son / Loran
  • Photos : Diego